Voilà, j'espère que ça sera à la hauteur de ce que vous attendez
S'il y a des choses à corriger, je suis toute ouïe ^^
Voilà deux mois qu'il avait ce fichu dossier, qu'il le regardait tous les jours, qu'il y posait la main, que son doigt frôlait le rebord. Pourtant, jamais encore il n'avait eu le courage de l'ouvrir. C'était stupide, ce dossier n'allait pas le manger. Pourtant, il n'y parvenait pas. Et s'il apprenait que ses parents, qu'il avait toujours encensés, étaient des criminels ? De moins que rien ? Ou des mauvais ? Il n'avait pas envie d'être déçu, il ne voulait pas découvrir qu'il était l'enfant de la honte. Il n'avait pas envie d'être gêné de son passé. Alors, pour l'instant, il s'en passait, purement et simplement. Ce n'était pas vraiment une solution, mais il n'en avait pas d'autres. Il n'arrivait pas à ouvrir ce bout de papier et lire ce qu'il contenait. Il le faudrait un jour, il le savait. Après tout, il s'était en partie engagé dans la police pour avoir accès à ce dossier, et il ne pouvait avoir tout cela pour rien ! Mais voilà, ce n'était pas simple. Pas simple du tout. Il n'avait jamais eu droit à une famille d'accueil à la hauteur, et l'orphelinat lui donnait encore des cauchemars. Il n'avait que ses parents pour lui procurer un peu de bonheur, et il s'y accrochait. Si cela venait à s'écrouler dès lors qu'il aurait ouvert ce dossier, il ne lui resterait plus rien. Que ferait-il dans ce cas-là ? Il n'en avait pas la moindre idée, et c'était bien là une part du problème.
Soupirant, il déposa le dossier de ses parents sur sa table de nuit, et laissa retomber son bras sur la couverture. Il continua de fixer le document un instant, puis ses yeux filèrent ver le plafond. Il se passa la main dans les cheveux, les ébouriffant plus qu'ils ne l'étaient déjà, et se frotta le torse nu de son autre main. Il n'avait aucune envie d'aller travailler, aujourd'hui. Aucune envie de voir cette mégère d'Isobel Peterson, qui allait encore lui balancer sa froideur et sa mauvaise humeur au visage. Il savait qu'il n'aurait pas la patience de la boucler et s'il l'ouvrait, cela risquait d'éclater. Mais il n'avait pas vraiment le choix. Il fallait bien qu'il se rende auprès d'elle. Il était de son devoir de la protéger. Bien entendu, il fallait qu'il dorme, aussi, de temps en temps, et pendant ces quelques heures, un autre officier prenait le relais. Mais il était son garde du corps officiel et c'était à lui de veiller à sa sécurité, même s'il la détestait cordialement.
Se redressant en poussant un grognement de courbaturé, il se retrouva assis dans son lit. Rapidement, il se leva, ajusta son caleçon qui avait tourné sans lui dans son sommeil, et fila dans la salle de bain. Il se dévêtit entièrement et plongea sous la douche. L'eau glaciale le crispa, puis l'eau chaude prit le relais. Il passa une bonne dizaine de minutes sous la douche, laissant couler l'eau sur son visage, appréciant sa douceur et sa chaleur. Il ressortit ensuite, propre comme un sous neuf, et enroula une serviette de bain autour de sa taille. Il se plaça devant le miroir, en essuya la buée qui s'y était collée, et se mit à se raser de près. Il se coiffa les cheveux, les ébouriffa et les laissa sécher à l'air libre. Il retourna dans sa chambre et laissa tomber la serviette pour enfiler un autre caleçon, propre, un pantalon, une chemise et une veste. Il s'alluma ensuite une cigarette, tira deux ou trois fois dessus avant de se diriger vers sa cuisine. Il se prépara un café fort, et un toast, qu'il enfourna sa cigarette à peine terminée. Après un petit-déjeuner rapide, il retourna à la salle de bain, se brossa les dents, s'inspecta, s'aspergea légèrement d'eau de toilette puis, vérifiant qu'il avait son arme et ses affaires, il sortit de son appartement.
C'est avec les pieds de plomb qu'il arriva au travail et prit le relais de son collègue. Il avait la mine rabougrie et l'on pouvait clairement voir sur son visage qu'il n'avait aucune envie de parler aujourd'hui. Malheureusement pour lui, la jeune femme dont il assurait la sécurité ne semblait pas décidée à lui donner ce plaisir. Pourtant, ce n'était pas habituel. Lui qui était toujours enjoué et chaleureux, l'opposé de sa patronne en somme, n'était que très rarement dans cet état. Elle n'avait pas à se plaindre de lui à ce niveau-là. Pourtant, elle n'avait même pas envie de faire un effort.
Elle lui fit une remarque désobligeante sur sa « mine affreuse », sans même un regard pour lui. Impulsif, il ne put s'empêcher de répondre directement, alors que d'habitude, il apprenait à se contenir et à ne pas réagir. Aujourd'hui, la goutte faisait déborder un vase déjà bien trop plein.
Vous n'avez pas à vous plaindre, vous n'avez à me supporter de mauvaise humeur que quelques jours par an. En ce qui me concerne, c'est mon lot quotidien, avec vous !
Il ne regrettait même pas ce qu'il venait de dire tant cela était vrai. Au moins, il l'avait fait réagir et elle se retourna vers lui en silence, le regard glacial. Il n'attendit même pas sa remarque suivante et lâcha ce qu'il avait sur le cœur. Il en avait ras le bol de supporter le mauvais caractère de la demoiselle.
Et puis c'est quoi, votre problème ? On ne vous a jamais appris à rire ? C'est pas croyable, ça vous ferait pas de mal de vous dévergonder un peu ! On n'a qu'une vie, que diable, allez-vous la passer à vous morfondre sur votre pauvre sort que vous vous construisez vous-même ? Et puis, merde, qu'est-ce que j'en ai à faire, après tout ? Vous n'êtes même pas capable de considérer les autres avec un peu moins de mépris ! Vous êtes constamment froide comme un glaçon, vous vous adressez à moi comme si je n'étais rien de plus qu'un petit raté de la société ! Vous savez quoi ? J'en ai ras le bol ! Je sais pas ce qui va pas chez vous, mais une chose est sûre, vous n'avez pas la cote !
Matt se sentait libéré. Il venait de lui dire ses quatre vérités, sans s'interrompre, sans qu'elle ne l'interrompe. Il ne supportait plus cette ambiance de travail, il ne savait même pas ce qu'il lui avait fait pour mériter un tel traitement. Elle était odieuse avec lui, ne partageait rien, et lui donnait constamment l'impression qu'il était un chien ennuyeux tout le temps dans ses pattes. Etait-ce sa faute à lui, si elle avait besoin d'un garde du corps ?
Et puis merde, y en a marre ! Vous ne voulez pas de moi dans vos pattes ? Ça tombe bien, j'en ai marre de vous dans les miennes, moi aussi ! Je me barre !
Matthews tourna les talons sans réfléchir et s'en alla de la pièce. S'il arrivait quelque chose à la jeune femme en son absence, il aurait de très gros ennuis. Mais il ne pouvait plus la voir en peinture. Enfin... surtout aujourd'hui.